MANIÉRISME

 

Ci-contre : El Greco - "L'Adoration des bergers" (1605), Musée du Prado, Madrid

A la veille du pillage de Rome par Charles Quint en 1527, l’art s’écarte de l’équilibre classique de la Renaissance. Un style, qui sera ultérieurement appelé «maniérisme» par l’historien de l’art Luigi Lanzi en 1792, conquiert tous les domaines artistiques et surtout la peinture. Né à Rome, ce courant s’épanouit dans toute l’Italie, puis se répand en Europe à partir de 1530 et persiste jusqu’en 1610.

Le terme dérive de maniera, synonyme de style à la Renaissance. Les peintres italiens vénèrent la maniera moderna des grands maîtres de la Renaissance, copiant et étudiant les oeuvres de Leonardo, Michelangelo ou Raffaello. Cette inspiration s’écarte de la nature et génère une expression étrange et artificielle, le caractère mystique et inquiet des œuvres faisant écho au déclin économique en Italie et aux attaques de Luther contre la papauté. Les 17ème et 18ème siècles donnent au maniérisme une connotation négative et réfutent son originalité et ce n’est qu’au 20ème siècle qu’on lui reconnaît une valeur stylistique propre.

 

CARACTÉRISTIQUES :

Les maniéristes utilisent fréquemment un support en bois et peignent sur le marbre, l’agate, l’albâtre, l’ardoise ou même sur le lapis-lazuli. Les ensembles décoratifs à fresque ornés de stucs (enduit imitant le marbre) se multiplient sur les voûtes et les plafonds des palais. Les sujets profanes dominent, les peintres réalisent des programmes allégoriques compliqués et des emblèmes. Genre très apprécié, le portrait est coupé à la taille et laisse les mains visibles. La composition est désordonnée et encombrée, les tableaux juxtaposent les plans superposés, tandis que les fresques décoratives présentent de savants effets d’illusionnisme. Le peintre fait montre de fantaisie et virtuosité pour les ornements, les accessoires orfévrés, les belles matières et un cadre architectural compliqué. Le pinceau s’applique à la stylisation précieuse des détails. La ligne serpentine exagère le contrapposto classique, étire les figures en longueur et les anime d’une douceur langoureuse. Les personnages féminins possèdent de petites têtes aux visages réguliers et froids. Les corps, nus ou vêtus de costumes collants qui en révèlent les formes, prennent l’aspect de la porcelaine. La lumière froide et parfois fantastique exalte les accords colorés grinçants : le parme côtoie l’orangé et le vert d’eau. La surface peinte entièrement lisse atteint une perfection émaillée.

 

ARTISTES :