ART BYZANTIN

 

Ci-contre : "Icône de saint Pierre (6ème siècle), couvent de Sainte Catherine, Sinai, Egypte

 

L’art de l’empire byzantin est intimement lié aux vicissitudes de sa capitale Constantinople (l’actuelle Istanbul). Le 29 mai 1453, en perçant les remparts de Constantinople, les Turcs mettaient fin à l’Empire byzantin. La disparition de ce très vieil Etat chrétien réduisit sa civilisation à un objet d’étude pour historiens et archéologues. On oublia bientôt jusqu’à son nom et les savants se mirent à l’appeler Byzance – nom initial de Constantinople.

L’art byzantin diffère étonnamment du cliché abstrait et rigide dans lequel on l’a parfois enfermé. Il est rare que l’on puisse identifier l’auteur d’une œuvre et les mécènes son eux-mêmes mal connus, mais les sources contemporaines témoignent de l’importance du rôle des images.

 

 

TROIS PÉRIODES

L’art byzantin se divise en trois périodes qui correspondent aux destinées politiques de l’Etat :

 

 

LES MOSAÏQUES

Ce moyen d’expression d’une beauté inaltérable n’était employé dans l’art romain que sur les sols. Les Byzantins en firent une véritable technique picturale dotée d’une riche palette de bleus, de verts et d’ors, perceptibles de très loin. En maîtrisant des thèmes puissants à très grande échelle, l’art byzantin instaura une norme qui allait stimuler les artistes jusqu’à la Renaissance.

L’on peut admirer notamment de somptueuses mosaïques dans la basilique San Vitale à Ravenna, véritable citée de la mosaïque (ci-contre : l'apôtre Pierre, détail, battistère de la cathédrale de Ravenna). Ses mosaïques présentent une maturité dans la convention stylistique – élégance retenue, austérité chargée d’émotion et solennité autoritaire et figée – qui allait former l’assise de tout l’art byzantin.

 

LES ICÔNES

L’icône est l’expression picturale par excellence de cet art : d’une part, elle est la source de son esthétique propre, radicalement opposée à ses origines classiques, d’autre part, elle constitue un nouveau terrain idéologique pour la peinture. L’icône suscita un engagement si profond qu’elle fit au 8ème siècle l’objet d’une vive polémique sur la place de l’art dans le culte chrétien. La culture byzantine est sans doute la seule où la peinture a joué un rôle capital en mettant la divinité à la portée du fidèle, avec de profondes répercussions dans toute la chrétienté. C’est par ailleurs l’icône qui transmit à la Renaissance les procédés et les modes de composition du portrait antique.

Le sens du mot icône en histoire de l’art est beaucoup plus restreinte que celle du grec eikon d’où il dérive et qui désigne tout type d’image, y compris les sculptures et même les simples images mentales. En histoire de l’art, le terme icône s’applique à une image religieuse peinte sur panneau de bois, représentant un sujet sacré, et destinée au culte. Il s’étend également à toute image sacrée : peintures murales, mosaïques et miniatures réalisées par d’autres techniques. Grâce à leur taille et à leur mobilité, les panneaux de bois peints occupèrent une place à part dans la vie médiévale. On pouvait ouvrir et fermer les icônes, les porter en procession dans la ville et les armées les emportaient parfois au combat, elles suivaient le cours des activités humaines. Chaque famille avait son «coin des icônes» que leur visiteur était censé saluer avant même de saluer son hôte. Le cadre de certaines icônes sont munis d’un couvercle coulissant pour permettre au propriétaire de se soustraire à la présence divine : en ouvrant le couvercle, il activait l’icône dont le regard spectaculaire s’illuminait brusquement.

Les icônes conservées étant très lacunaires, en partie à cause de leur fragilité, leur histoire est délicate à établir. Sans entretien, les panneaux de bois se fendillent et s'abîme avec l’humidité, comme s’ils s’efforçaient de se défaire de la couche de peinture qui les recouvre ; ils sont par ailleurs la nourriture idéale des termites et des scarabées. L’intervention de l’homme a elle aussi causée beaucoup de dégâts : les fidèles les ont involontairement menacés de leur cierges, et leurs ennemis y ont vu une proie facile, que ce soit des chrétiens puristes qui cherchaient à les soustraire à un usage religieux ou des non-chrétiens résolus à éradiquer la religion.

La Russie a conservée une multitude d’ icônes postérieures au 15ème siècle mais plus on remonte dans le temps, plus elles sont rares. Il en subsiste une trentaine des 6ème et 7ème siècles mais il n’en existe aucune qui soit plus ancienne.

 

CARACTÉRISTIQUES :

Ces panneaux représentent par rapport aux normes de la peinture classique une innovation radicale qui est parfois attribuée à tort à l’art chrétien. Les personnages statiques sont figurés frontalement et une attention minime est portée à leur anatomie et à l’espace qui les entoure. Les peintures classiques présentent normalement une sorte de scène sur laquelle les personnages jouent des rôles entre eux, mais ici, ceux-ci impliquent le spectateur dont ils sollicitent la réaction. Le récit fait place au contact visuel. L’auréole, l’anneau de lumière ou de feu qui entoure la tête, souligne la puissance du dieu, tout en attirant l’œil du spectateur comme un rayon de soleil.

D’autres icônes du 6ème siècle, relevant d’un courant différent, sont les héritières de la tradition du portrait peint de la Rome antique. L’artiste remplace la tempera (détrempe à base d’œuf) par l’encaustique, c’est-à-dire des pigments liés par un médium à base de cire. C’était la technique favorite des portraitistes romains. La translucidité de la cire donne aux tons du visage un éclat proche de celui des peintures à l’huile modernes. Le format en buste est également typique du portrait romain, alors que le personnage en pied est caractéristique de l’iconographie païenne traditionnelle.

L’icône byzantine est donc la synthèse de l’effigie païenne et du portrait profane romain. La ressemblance était extrêmement importante pour les chrétiens car elle justifiait le culte de l’image, mais elle l’était moins pour leurs prédécesseurs païens.

Ainsi, dès le début, les icônes byzantines furent parées de tous les procédés et modes de composition du portrait romain et l’image autrefois païenne, genre mineur aux possibilités artistiques limitées, fut agrandie et transformée en un moyen d’expression d’importance capitale pour l’art occidental. En même temps, l’art du portrait s’accompagna d’une multitude d’associations plus anciennes. La littérature classique décrit des portraits si fidèles qu’ils trompaient le spectateur : on les offrait pour rappeler des amis absents ou encore des jeunes gens tombaient amoureux à la simple vue d’un portrait. En s’intégrant à la tradition du portrait, l’icône chrétienne s’associa toutes ces connotations sentimentales, comme le reflètent les textes. Les icônes étaient censées susciter chez le spectateur une réaction personnelle et même de l’affection.